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bactérie

  • Dialogue avec mes microbes

    Petit texte humoristique s'inspirant d'un livre très sérieux...

     

    Hello Folks !

    Salut les microbes ! Je suis votre chef de bord !

    Soyez les bienvenus en ce corps que j'ai l'honneur de piloter pour votre salut et votre confort. J'espère que nous ferons ensemble un beau voyage, et je compte sur vous pour m'aider à le rendre agréable. Comme moi, vous avez tout intérêt à ce que ce corps _ notre véhicule_ fonctionne du mieux possible, et je compte sur votre participation aux différentes fonctions vitales qui permettent de vivre tous ensemble en pleine harmonie.

    Mes services m'ont néanmoins signalé qu'il y a parmi vous quelques pique-pokets, et je vous invite à vous en méfier... Les usurpateurs, les tricheurs et les voleurs doivent être mis hors d'état de nuire, et j'ai le plaisir de vous annoncer que pour votre sécurité, ce véhicule est équipé d'un système immunitaire adapté à cette fonction. Sachez que je porte un grand intérêt au confort de mes passagers, à leur sécurité, et à la possibilité pour eux d'établir des relations de bon voisinage avec leurs partenaires de voyage. Le système immunitaire est là pour vous y aider, mais il se pourrait aussi qu'en cas de crise grave, comme par exemple une agression extérieure, nous ayons besoin du concours de tous pour éliminer la menace. Aussi, n'hésitez pas à collaborer activement avec le système immunitaire. Si vous avez des demandes particulières, n'hésitez pas à me les transmettre par voie chimique, via le système sanguin ou de toute autre manière.

    J'attache un soin particulier à satisfaire les désirs de mes passagers, que ce soit par le choix d'un lieu de vie agréable à tous, d'une destination de voyage enrichissante, ou d'échanges profitables avec des partenaires humains dont les goûts et les odeurs sont compatibles avec les nôtres.

    Mais surtout, n'hésitez pas lorsque vous êtes contents, à le faire savoir en secrétant cette merveilleuse sérotonine qui est la signature de la joie de vivre. Toutes les cellules du corps, quelque soit leur fonction vitale, ne vivent QUE pour cette sérotonine ! Quel serait le sens du voyage, si ce n'était pour être contents ensemble ? A quoi servirait une vie sans amour ? Ce serait la dépression !

    Nos destins sont liés, voyez-vous, car vous avez besoin que toutes les cellules de ce corps soient en bonne santé : si le corps meurt, vous mourrez aussi. Et en retour, les cellules ont besoin de votre soutien, sans quoi elles n'ont plus envie de vivre. Nous voilà donc en route pour une croisière agréable.

    Cela dit, j'ai aussi le devoir de vous informer que ce véhicule n'est pas éternel. Tout, sur cette Terre, semble d'une durée limitée. Nous allons donc tenter ensemble de vivre le plus longuement possible, mais quels que soient nos efforts, il viendra un moment où cela nous demandera à tous une telle énergie, que le jeu n'en vaudra plus la chandelle.

    Je sais que la plupart d'entre-vous peuvent se transformer en tueurs. Alors, quand ce sera le moment d'en finir, il se pourrait que nous fassions appel à vous, ou à certains d'entre-vous, pour que le processus soit rapide et radical. Une bonne fièvre durant le sommeil, pourrait très bien faire l'affaire.

    Avez-vous des questions ?

    _ Quand est-ce qu'on mange ?

    _ Moi : Ha-ha-ha ! Apparemment vous n'avez pas encore trouvé le restaurant ? Il en existe de nombreuses salles, tout au long de l'avenue principale, que l'on appelle "le tube digestif"

    _ J'ai vu, chef, mais personne ne veut me prendre à sa table !

    _ Padepanix Bacillia : Permettez que je réponde à ce jeune homme ?

    _ Moi : Bien sûr !

    _ Padepanix Bacillia : Si vous voulez qu'on vous fasse une place à table, il faut que vous vous présentiez et que vous apportiez quelque chose d'agréable... Comment vous appelez-vous ?

    _ Mon nom est Crocus Bacillium

    _ Padepanix Bacillia : Bon hé bien... Crocus, je vois que vous êtes nouveau ici... sachez que lorsque nous sommes réunis à plusieurs autour d'une table, en fonction de nos affinités, et que nous voyons arriver un inconnu, nous avons besoin de savoir s'il a de bonnes intentions, et si l'échange sera profitable. Sinon nous le repoussons à coup de produits chimiques...

    _ Moi : Merci Padepanix pour votre intervention, mais... Qui êtes-vous au juste ?

    _ Padepanix Bacillia : Je suis la chargée de communication de cette assemblée !

    _ Moi : Oh là là... Je vois que vous êtes diablement organisés !

    _ Padepanix Bacillia : Divinement, si vous permettez... Divinement...

    _ Encyclopedix Britanicus : C'est que nous sommes là depuis bien longtemps ! Nous étions là bien avant l'espèce humaine et du reste, nous avons participé à votre naissance.

    _ A ma naissance à moi, dis-je, ou à celle de l'espèce humaine ?

    _ Encyclopedix Britanicus : Les deux ! Bien avant les mammifères, nous étions déjà sur la Terre, et nous avons participé à l'élaboration de vos structures. La digestion, la respiration, la reproduction, sont des fonctions que nous maîtrisons depuis fort longtemps, et qui chez vous, sont la réplication des nôtres. Même votre système immunitaire, avec ses cellules tueuses, est construit à l'image de ce que nous savons faire de mieux, nous les microbes.

    _ Generalissim Microscopix : C'est que nous ne sommes pas des enfants de choeur !

    _ Moi : Ce que vous me dites me donne froid dans le dos ! Les êtres humains ont donc de bonnes raisons de craindre les attaques microbiennes...

    _ Generalissim Microscopix : Bien sûr ! Mais il ne faut pas tous nous mettre dans le même sac ! Il ne faut pas confondre les barbares qui viennent de l'extérieur, juste pour vous dévorer, et nous qui sommes ici, installés depuis longtemps...

    _ Padepanix Bacillia : Generalisim est notre chef des armées. Il a la lourde charge de repousser les envahisseurs...

    _ Moi : Mais comment puis-je vous distinguer des barbares qui nous menacent ?

    _ Encyclopedix Britanicus : Les barbares sont des peuplades sauvages... Et nous sommes des sédentaires, tandis qu'eux sont nomades...

    _ Generalissim Microscopix : Puisque vous avez connu les invasions barbares, vous savez bien comment ils fonctionnent : ils ne voient les choses qu'à court terme. Ils bousillent tout sur leur passage, y compris l'outil de production.

    _ Mathematix Bacillium : Exactement ! Un rapide calcul vous montrera combien ils se trompent. Il est clair que tout le monde veut se nourrir, mais... Si on prend l'exemple d'un homme comme vous, pesant 70 kg et mangeant chaque jour environ 500g d'aliments variés...

    Sachant qu'en moyenne, nous parvenons, nous les bactéries, à prélever entre 10 et 20 pour cent de votre nourriture, ce qui fait environ 70g par jour, n'est-ce pas ? Alors que vaut-il mieux faire ? Dévorer en une seule fois vos 70 kg, ou bien prélever chaque jour 70 g de votre nourriture ?

    _ Moi : Je ne sais pas...

    _ Mathematix Bacillium : Mais c'est bien simple ! Vous avez noté, je pense, que 70g, c'est le millième de 70 kg ? Donc si votre espérance de vie est supérieure à 1000 jours, il est préférable pour nous de profiter tranquillement des 70g par jour que vous nous apportez...

    _ Generalissim Microscopix : Voilà pourquoi nous n'avons aucun intérêt à lancer une attaque contre vous, tant que vous avez au moins 3 ans d'espérance de vie ! Et c'est pourquoi les barbares qui veulent attaquer avant, nous devons les écarter. En revanche, quand sonnera pour vous l'heure de la fin, les enjeux seront différents...

    _ Encyclopedix Britanicus : Depuis la nuit des temps, les choses se déroulent ainsi, selon un mécanisme simple, mais bien huilé. Nous les sédentaires, nous vous aidons à vous défendre contre les envahisseurs, jusqu'à la fin de votre vie. Et tout à la fin, nous abrégeons vos souffrances. Mais ce qui vient bousculer les choses, aujourd'hui, ce sont les antibiotiques...

    A l'évocation de ce mot, un vent de panique se met à souffler sur l'assemblée :

    _ Antibiotix ! Antibiotix ! répètent les microbes avec effroi

    _ Padepanix Bacillia : Calmez-vous, voyons ! Nous ne faisons que parler ! Aucun antibiotique n'a été lancé ici !

    _ C'est vrai qu'autrefois, dis-je, lorsque quelqu'un était foudroyé par une cause inconnue, on disait simplement : "il a eu une attaque". Et on se contentait de cette explication...

    _ Encyclopedix Britanicus : L'expression était assez juste : il s'agissait souvent d'une attaque microbienne survenue en fin de vie, qui permettait d'abréger les derniers moments. Généralement la personne tombait dans les pommes, car on lui faisait perdre conscience d'une manière ou d'une autre, et c'était sans douleur.

    _ Generalissim Microscopix : Mais aujourd'hui vos médecins s'opposent farouchement à ces attaques, en nous aspergeant d'antibiotiques. Cela vous évite certes la mort pour un temps, mais pas les tourments de la dégénérescence.

    _ Encyclopedix Britanicus : On ne s'oppose pas impunément à la nature.

    _ Je suis impressionné, dis-je, par votre hauteur de vue. Et la sagesse de vos observations !

    _ Angelus Inspiratrix : Vous ne croyez pas si bien dire ! Entendez-vous parfois une petite voix dans votre tête, qui vous prodigue des conseils, ou vous souffle des solutions ?

    _ Moi : Cela m'arrive en effet...

    _ Angelus Inspiratrix (malicieusement) : De qui croyez-vous qu'il s'agit ?

    _ Moi : Je ne sais pas... Un ange ? La muse du poète ?

    _ Angelus Inspiratrix : Mais les anges ne résident-ils pas à l'extérieur de vous ? Et la muse du poète n'est-elle pas cette jeune femme qui s'invite à sa table, afin de l'inspirer et de l'encourager ?

    _ Moi : Oui, c'est ce qu'on dit...

    _ Angelus Inspiratrix : Or cette petite voix, qui chuchote dans votre tête, et que vous avez parfaitement localisée, ne vient-elle pas de l'intérieur de vous-même ? Vous devriez y réfléchir, cher Monsieur...

    _ Moi : Quoi ? Vous voulez dire que les voix que j'entends dans ma tête proviennent des microbes ?

    _ Angelus Inspiratrix (s'inclinant ironiquement en une révérence profonde) : Puisque vous le dites...

    _ Moi (interloqué) : Grands Dieux ! Alors vous relayez la voix des anges ! Et dire qu'on vous prenait pour des parasites !

    Régis Fagot-Barraly

     

    N.B. Ce texte _ à prendre bien entendu au second degré_ m'est venu suite à la lecture du livre La Santé PAR les microbes, du Docteur Martin J.Blaser, Professeur de Médecine et Directeur du programme de recherches de microbiologie à l'Université de New-York.

    Ce livre est bourré d'informations surprenantes : pour vous mettre en appétit, en voici deux citations :

    "Savez-vous que votre corps héberge une communauté très particulière de 100.000 milliards de microbes, dix fois plus nombreux que vos propres cellules ? Longtemps perçus comme des parasites inutiles, voire dangereux, ces microbes vous font aussi du bien, du point de vue immunitaire et digestif."

    "Forts de leurs 20 millions de gènes, nos microbes résidents nous protègent de la maladie. Ce sont les guérilleros qui défendent le domaine tant que nous les protégeons."

  • Dialogue avec mes microbes

    Petit texte humoristique s'inspirant d'un livre très sérieux...

     

    Hello Folks !

    Salut les microbes ! Je suis votre chef de bord !

    Soyez les bienvenus en ce corps que j'ai l'honneur de piloter pour votre salut et votre confort. J'espère que nous ferons ensemble un beau voyage, et je compte sur vous pour m'aider à le rendre agréable. Comme moi, vous avez tout intérêt à ce que ce corps _ notre véhicule_ fonctionne du mieux possible, et je compte sur votre participation aux différentes fonctions vitales qui permettent de vivre tous ensemble en pleine harmonie.

    Mes services m'ont néanmoins signalé qu'il y a parmi vous quelques pique-pokets, et je vous invite à vous en méfier... Les usurpateurs, les tricheurs et les voleurs doivent être mis hors d'état de nuire, et j'ai le plaisir de vous annoncer que pour votre sécurité, ce véhicule est équipé d'un système immunitaire adapté à cette fonction. Sachez que je porte un grand intérêt au confort de mes passagers, à leur sécurité, et à la possibilité pour eux d'établir des relations de bon voisinage avec leurs partenaires de voyage. Le système immunitaire est là pour vous y aider, mais il se pourrait aussi qu'en cas de crise grave, comme par exemple une agression extérieure, nous ayons besoin du concours de tous pour éliminer la menace. Aussi, n'hésitez pas à collaborer activement avec le système immunitaire. Si vous avez des demandes particulières, n'hésitez pas à me les transmettre par voie chimique, via le système sanguin ou de toute autre manière.

    J'attache un soin particulier à satisfaire les désirs de mes passagers, que ce soit par le choix d'un lieu de vie agréable à tous, d'une destination de voyage enrichissante, ou d'échanges profitables avec des partenaires humains dont les goûts et les odeurs sont compatibles avec les nôtres.

    Mais surtout, n'hésitez pas lorsque vous êtes contents, à le faire savoir en secrétant cette merveilleuse sérotonine qui est la signature de la joie de vivre. Toutes les cellules du corps, quelque soit leur fonction vitale, ne vivent QUE pour cette sérotonine ! Quel serait le sens du voyage, si ce n'était pour être contents ensemble ? A quoi servirait une vie sans amour ? Ce serait la dépression !

    Nos destins sont liés, voyez-vous, car vous avez besoin que toutes les cellules de ce corps soient en bonne santé : si le corps meurt, vous mourrez aussi. Et en retour, les cellules ont besoin de votre soutien, sans quoi elles n'ont plus envie de vivre. Nous voilà donc en route pour une croisière agréable.

    Cela dit, j'ai aussi le devoir de vous informer que ce véhicule n'est pas éternel. Tout, sur cette Terre, semble d'une durée limitée. Nous allons donc tenter ensemble de vivre le plus longuement possible, mais quels que soient nos efforts, il viendra un moment où cela nous demandera à tous une telle énergie, que le jeu n'en vaudra plus la chandelle.

    Je sais que la plupart d'entre-vous peuvent se transformer en tueurs. Alors, quand ce sera le moment d'en finir, il se pourrait que nous fassions appel à vous, ou à certains d'entre-vous, pour que le processus soit rapide et radical. Une bonne fièvre durant le sommeil, pourrait très bien faire l'affaire.

    Avez-vous des questions ?

    _ Quand est-ce qu'on mange ?

    _ Moi : Ha-ha-ha ! Apparemment vous n'avez pas encore trouvé le restaurant ? Il en existe de nombreuses salles, tout au long de l'avenue principale, que l'on appelle "le tube digestif"

    _ J'ai vu, chef, mais personne ne veut me prendre à sa table !

    _ Padepanix Bacillia : Permettez que je réponde à ce jeune homme ?

    _ Moi : Bien sûr !

    _ Padepanix Bacillia : Si vous voulez qu'on vous fasse une place à table, il faut que vous vous présentiez et que vous apportiez quelque chose d'agréable... Comment vous appelez-vous ?

    _ Mon nom est Crocus Bacillium

    _ Padepanix Bacillia : Bon hé bien... Crocus, je vois que vous êtes nouveau ici... sachez que lorsque nous sommes réunis à plusieurs autour d'une table, en fonction de nos affinités, et que nous voyons arriver un inconnu, nous avons besoin de savoir s'il a de bonnes intentions, et si l'échange sera profitable. Sinon nous le repoussons à coup de produits chimiques...

    _ Moi : Merci Padepanix pour votre intervention, mais... Qui êtes-vous au juste ?

    _ Padepanix Bacillia : Je suis la chargée de communication de cette assemblée !

    _ Moi : Oh là là... Je vois que vous êtes diablement organisés !

    _ Padepanix Bacillia : Divinement, si vous permettez... Divinement...

    _ Encyclopedix Britanicus : C'est que nous sommes là depuis bien longtemps ! Nous étions là bien avant l'espèce humaine et du reste, nous avons participé à votre naissance.

    _ A ma naissance à moi, dis-je, ou à celle de l'espèce humaine ?

    _ Encyclopedix Britanicus : Les deux ! Bien avant les mammifères, nous étions déjà sur la Terre, et nous avons participé à l'élaboration de vos structures. La digestion, la respiration, la reproduction, sont des fonctions que nous maîtrisons depuis fort longtemps, et qui chez vous, sont la réplication des nôtres. Même votre système immunitaire, avec ses cellules tueuses, est construit à l'image de ce que nous savons faire de mieux, nous les microbes.

    _ Generalissim Microscopix : C'est que nous ne sommes pas des enfants de choeur !

    _ Moi : Ce que vous me dites me donne froid dans le dos ! Les êtres humains ont donc de bonnes raisons de craindre les attaques microbiennes...

    _ Generalissim Microscopix : Bien sûr ! Mais il ne faut pas tous nous mettre dans le même sac ! Il ne faut pas confondre les barbares qui viennent de l'extérieur, juste pour vous dévorer, et nous qui sommes ici, installés depuis longtemps...

    _ Padepanix Bacillia : Generalisim est notre chef des armées. Il a la lourde charge de repousser les envahisseurs...

    _ Moi : Mais comment puis-je vous distinguer des barbares qui nous menacent ?

    _ Encyclopedix Britanicus : Les barbares sont des peuplades sauvages... Et nous sommes des sédentaires, tandis qu'eux sont nomades...

    _ Generalissim Microscopix : Puisque vous avez connu les invasions barbares, vous savez bien comment ils fonctionnent : ils ne voient les choses qu'à court terme. Ils bousillent tout sur leur passage, y compris l'outil de production.

    _ Mathematix Bacillium : Exactement ! Un rapide calcul vous montrera combien ils se trompent. Il est clair que tout le monde veut se nourrir, mais... Si on prend l'exemple d'un homme comme vous, pesant 70 kg et mangeant chaque jour environ 500g d'aliments variés...

    Sachant qu'en moyenne, nous parvenons, nous les bactéries, à prélever entre 10 et 20 pour cent de votre nourriture, ce qui fait environ 70g par jour, n'est-ce pas ? Alors que vaut-il mieux faire ? Dévorer en une seule fois vos 70 kg, ou bien prélever chaque jour 70 g de votre nourriture ?

    _ Moi : Je ne sais pas...

    _ Mathematix Bacillium : Mais c'est bien simple ! Vous avez noté, je pense, que 70g, c'est le millième de 70 kg ? Donc si votre espérance de vie est supérieure à 1000 jours, il est préférable pour nous de profiter tranquillement des 70g par jour que vous nous apportez...

    _ Generalissim Microscopix : Voilà pourquoi nous n'avons aucun intérêt à lancer une attaque contre vous, tant que vous avez au moins 3 ans d'espérance de vie ! Et c'est pourquoi les barbares qui veulent attaquer avant, nous devons les écarter. En revanche, quand sonnera pour vous l'heure de la fin, les enjeux seront différents...

    _ Encyclopedix Britanicus : Depuis la nuit des temps, les choses se déroulent ainsi, selon un mécanisme simple, mais bien huilé. Nous les sédentaires, nous vous aidons à vous défendre contre les envahisseurs, jusqu'à la fin de votre vie. Et tout à la fin, nous abrégeons vos souffrances. Mais ce qui vient bousculer les choses, aujourd'hui, ce sont les antibiotiques...

    A l'évocation de ce mot, un vent de panique se met à souffler sur l'assemblée :

    _ Antibiotix ! Antibiotix ! répètent les microbes avec effroi

    _ Padepanix Bacillia : Calmez-vous, voyons ! Nous ne faisons que parler ! Aucun antibiotique n'a été lancé ici !

    _ C'est vrai qu'autrefois, dis-je, lorsque quelqu'un était foudroyé par une cause inconnue, on disait simplement : "il a eu une attaque". Et on se contentait de cette explication...

    _ Encyclopedix Britanicus : L'expression était assez juste : il s'agissait souvent d'une attaque microbienne survenue en fin de vie, qui permettait d'abréger les derniers moments. Généralement la personne tombait dans les pommes, car on lui faisait perdre conscience d'une manière ou d'une autre, et c'était sans douleur.

    _ Generalissim Microscopix : Mais aujourd'hui vos médecins s'opposent farouchement à ces attaques, en nous aspergeant d'antibiotiques. Cela vous évite certes la mort pour un temps, mais pas les tourments de la dégénérescence.

    _ Encyclopedix Britanicus : On ne s'oppose pas impunément à la nature.

    _ Je suis impressionné, dis-je, par votre hauteur de vue. Et la sagesse de vos observations !

    _ Angelus Inspiratrix : Vous ne croyez pas si bien dire ! Entendez-vous parfois une petite voix dans votre tête, qui vous prodigue des conseils, ou vous souffle des solutions ?

    _ Moi : Cela m'arrive en effet...

    _ Angelus Inspiratrix (malicieusement) : De qui croyez-vous qu'il s'agit ?

    _ Moi : Je ne sais pas... Un ange ? La muse du poète ?

    _ Angelus Inspiratrix : Mais les anges ne résident-ils pas à l'extérieur de vous ? Et la muse du poète n'est-elle pas cette jeune femme qui s'invite à sa table, afin de l'inspirer et de l'encourager ?

    _ Moi : Oui, c'est ce qu'on dit...

    _ Angelus Inspiratrix : Or cette petite voix, qui chuchote dans votre tête, et que vous avez parfaitement localisée, ne vient-elle pas de l'intérieur de vous-même ? Vous devriez y réfléchir, cher Monsieur...

    _ Moi : Quoi ? Vous voulez dire que les voix que j'entends dans ma tête proviennent des microbes ?

    _ Angelus Inspiratrix (s'inclinant ironiquement en une révérence profonde) : Puisque vous le dites...

    _ Moi (interloqué) : Grands Dieux ! Alors vous relayez la voix des anges ! Et dire qu'on vous prenait pour des parasites !

    Régis Fagot-Barraly

     

    N.B. Ce texte _ à prendre bien entendu au second degré_ m'est venu suite à la lecture du livre La Santé PAR les microbes, du Docteur Martin J.Blaser, Professeur de Médecine et Directeur du programme de recherches de microbiologie à l'Université de New-York.

    Ce livre est bourré d'informations surprenantes : pour vous mettre en appétit, en voici deux citations :

    "Savez-vous que votre corps héberge une communauté très particulière de 100.000 milliards de microbes, dix fois plus nombreux que vos propres cellules ? Longtemps perçus comme des parasites inutiles, voire dangereux, ces microbes vous font aussi du bien, du point de vue immunitaire et digestif."

    "Forts de leurs 20 millions de gènes, nos microbes résidents nous protègent de la maladie. Ce sont les guérilleros qui défendent le domaine tant que nous les protégeons."